À quel âge docteur ?


Par Dre Caroline Coulombe, optométriste

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Une croyance fortement ancrée stipule qu'un enfant doit subir son premier examen avant d'entrer à l'école. Or il s'avère qu'à 5 ans, le système visuel est déjà moins malléable que lorsqu'il a 2 ans et, bien sûr, cela devient l'horreur lorsque l'enfant ne voit pas d'un ?il et que des traitements orthoptiques pour l'amblyopie s'avèrent nécessaires?

Une histoire typique est le jeune garçon (la fierté de ses parents) qui liera la plus petite ligne facilement avec son ?il droit (acuité de 6/6), mais arrêtera sur mon dessin le plus gros lorsque vient le temps de lire avec son ?il gauche (acuité de 6/120). Si l'enfant a le malheur d'avoir les yeux droits, (et oui, je suis ironique ici, mais les parents consultent habituellement rapidement lorsque les yeux de leurs chéris sont croches), le parent ne verra pas l'importance de consulter plus tôt et il tombera des nues lorsque je lui annoncerai que, non seulement son enfant aura besoin de lunettes, mais qu'en plus il est aveugle d'un ?il, et que si on n'agit pas rapidement, il restera aveugle de cet ?il.

Cette histoire, nous la vivons malheureusement trop souvent et cela, même en 2014 alors que la Régie de l'assurance maladie du Québec paie pour les examens de la vue des enfants de 17 ans et moins. Ce qui manque, c'est l'information : un enfant doit consulter dès l'âge de 6 mois pour un premier contrôle. Je tiens ici quand même à vous rassurer : les complications notées à cet âge sont habituellement prises en charge par le pédiatre et il y a peu d'échappées, mais à pourquoi prendre le risque? À l'âge de 6 mois, on s'assure que l'enfant ne présente pas de maladies  graves (rétinoblastome), que ses mobilités oculaires sont normales, que sa réfraction semble dans les normales et que ses yeux sont en bonne voie de développement. En 18 ans, j'ai vu peu de cas échapper au pédiatre, mais quand même, pourquoi ne pas s'assurer que l'enfant est en bonne voie de bien se développer?

À moins d'un état réfractif grave ou d'un problème décelé lors de son premier examen, ce sera vers l'âge de 2 ans que l'optométriste pourra évaluer la vision de l'enfant et effectuer un examen un peu plus complet. L'examen sera alors recommandé de façon annuelle afin de bien suivre le développement de l'enfant. Si à l'âge de 2 ans l'enfant ne parle pas, ce qui arrive parfois, de nombreux indices nous seront laissés advenant qu'il y ait un problème. Par exemple,  il ne nous laissera pas cacher le seul ?il avec lequel il voit. Il tentera par tous les moyens de nous esquiver. Par exemple, son instinct lui commandera de nous tasser la main qui tient la cache ou de se tortiller sur la chaise pour réussir à voir de l'autre ?il.

C'est alors que nous procéderons à un test appelé «Â examen sous cycloplégie ». Il s'agit de mettre des gouttes de cyclopentolate afin de paralyser le muscle accommodateur et de permettre une évaluation précise et ce, même si nous n'avons pas la coopération de l'enfant.  Ce test est nécessaire, peu importe l'âge du patient, afin de déterminer la force que devra avoir la lunette, permettant ainsi une optimisation du traitement. La RAMQ n'assume pas ce deuxième examen et des frais raisonnables seront alors chargés au patient.

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Reprenons le cas de mon jeune homme du début et donnons-lui 2 ans au lieu de 5 et nous améliorons considérablement le pronostic de vision de cet enfant puisque le développement de la 3D n'est pas complété et que le système visuel est vraiment plus malléable à cet âge.  Néanmoins, si, il y a 20 ans, on arrêtait les traitements d'amblyopie lorsque le patient avait 5 ans, nous les effectuons aujourd'hui jusqu'à l'âge d'environ 12 ans. Cependant, pour le vivre dans nos cliniques, l'amélioration est beaucoup plus lente et il est très difficile de garder motivés ces enfants et parents. Dieu merci la plupart des enfants ont de bons yeux et n'ont aucun problème visuel, mais comme je n'ai parlé ici que d'un exemple précis, les enfants ont un réel  besoin d'être vérifiés à chaque année. Parfois, les parents négligent et c'est vraiment dommage.  Un rappel du pharmacien, du médecin de famille ou tout autre professionnel de la santé ne peut pas nuire et pourra parfois sauver une année scolaire, un problème d'estime de soi ou carrément la vision de l'enfant.

 

Concernant les adultes, un examen aux 2 ans est conseillé à moins d'une indication contraire.  Par exemple, si le patient porte des lentilles cornéennes, un examen à chaque année sera indiqué.  C'est la même chose si le patient est à fort risque de développer une maladie traitable.  Actuellement, les adultes aux bons yeux sont les moins bien suivis. Combien de fois un glaucome est dépisté parce que le patient avait brisé ses lunettes? De plus, de nombreuses atteintes oculaires, dont le glaucome, par exemple, ne présenteront pas de symptômes aux premiers stades de la maladie. Lorsque la vision du patient est atteinte et symptomatique, il est déjà tard pour intervenir. Comme la maladie du glaucome ne se maîtrise pas, on ne fait que la ralentir avec tous nos traitements, le moment du diagnostic est primordial si l'on veut préserver la vision en fonction de l'espérance de vie du patient.

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L'adulte qui vieillit ou tout simplement qui n'est plus en aussi bonne santé doit nous consulter plus souvent. Une hypertension artérielle mal contrôlée, un taux de cholestérol trop élevé sont des exemples de conditions qui ternissent le pronostic de vision du patient et le prédispose à des conditions visuelles moins bonnes. Le patient diabétique est plus à risque de développer des cataractes, plus à risque au niveau glaucome et devra être dilaté à chaque année afin de s'assurer qu'il ne présente pas de rétinopathie diabétique. Il est important de préciser ici que la RAMQ couvre les examens annuels des patients de plus de 65 ans. Seuls les tests spécialisés seront à la charge du patient (photo rétinienne, OCT (tomographie par cohérence optique)).

Il est essentiel que nos patients soient à l'écoute de leur corps, qu'ils n'aient pas peur de nous communiquer leurs symptômes, il sera à nous de juger si nous devons ou non en tenir compte et, bien sûr, référer à nos collègues ophtalmologistes avec lesquels nous travaillons en collaboration et pour lesquels nous avons un respect sans borne puisqu'ils partagent avec nous la volonté de préserver la vision de nos patients.


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